Côte d’Ivoire

Publié en 2019

Législations pertinentes

Résumé

Peu de protections sont disponibles pour les lanceurs d’alerte en Côte d’Ivoire. Les lanceurs d’alerte ne sont pas spécifiquement protégés par une loi. Le président Ouattara s’est publiquement engagé à mettre fin à la corruption et aux violations des droits de l’homme ainsi qu’à la culture d’impunité dont jouissent les autorités, mais une réticence continuelle de poursuivre les forces loyales au gouvernement limite l’efficacité du lancement d’alerte.

La liberté d’expression et l’environnement médiatique en Côte d’Ivoire se sont améliorés au cours des dernières années. La Constitution de 2016 réaffirme que « La liberté de pensée et la liberté d’expression […] sont garanties à tous ». Les journalistes et les partisans de l’opposition ne sont plus soumis à la répression violente qui a caractérisé la première décennie du 20ème siècle. Toutefois, les sanctions pénales applicables à la diffamation diffèrent d’une loi à l’autre, ce qui crée un biais potentiel dans la poursuite des affaires de diffamation. Un vote parlementaire sur un projet de loi de médias criminalisant certaines activités journalistiques était prévu pour mai 2017, mais reporté en raison de la pression des groupes de la société civile et des médias.

Les troubles persistants causés par les mutineries populaires pourraient être associés avec un déclin des libertés de la presse. Au moins six journalistes ont été arrêtés illégalement depuis la mutinerie de janvier 2017, ce qui laisse craindre que le progrès en matière de liberté de la presse ne soit freiné.

Lois et mesures relatives aux lanceurs d’alerte

Aucune loi ni politique ivoirienne ne contient de dispositions protégeant directement les lanceurs d’alerte.

Une nouvelle Constitution a été approuvée par référendum en octobre 2016 et adoptée en novembre 2016. Elle prévoit la liberté d’exprimer et de diffuser ses idées. Cependant, ces libertés « s’exercent sous la réserve du respect de la loi, des droits d’autrui, de la sécurité nationale et de l’ordre public ». Aucune disposition spécifiquement liée au lancement d’alerte ne figure dans la nouvelle Constitution ni dans les précédentes versions.

Le Code du travail ne prévoit aucune protection pour les lanceurs d’alerte. Les motifs légitimes de licenciement sont ambigus et incluent « une faute lourde de l’une des parties » et des « raisons personnelles », telles qu’une insuffisance professionnelle ou un « comportement fautif » pour des contrats à durée indéterminée. Il n’est pas clair si le lancement d’alerte peut être considéré comme un motif légitime de licenciement. Alors que toutes les formes de « harcèlement moral » sont interdites, le harcèlement en tant que représailles pour avoir dénoncé ou divulgué des informations n’est pas traité spécifiquement.

Faiblesses et réformes requises

Comme indiqué ci-dessus, la Côte d’Ivoire manque cruellement de protections pour les lanceurs d’alerte. Rien n’indique que le gouvernement envisage d’élaborer et de mettre en place des protections pour les lanceurs d’alerte. Cependant, la société civile a récemment attiré l’attention sur la nécessité d’un plaidoyer vigoureux en faveur de l’adoption d’une loi autonome sur la protection des lanceurs d’alerte, comme par exemple lors de la réunion de travail de sensibilisation de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur une mise en place d’une stratégie de protection des lanceurs d’alerte.

Lois de confidentialité

La divulgation d’information militaire est punissable d’une peine d’emprisonnement à perpétuité en vertu du code pénal ivoirien, en fonction de l’intention de l’auteur de l’acte. La révélation des secrets confiés par « état ou profession » est punie de six mois de prison au maximum; alors que la divulgation d’informations déclarées secrètes par les autorités est punissable d’une peine maximale de trois mois d’emprisonnement. La non-divulgation d’acte d’espionnage ou de trahison est punissable d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 20 ans, sous réserve de l’obligation découlant du secret professionnel.

Une loi sur l’accès à l’information permet de partager des documents publics et des « informations d’intérêt public ». Toutefois, « seule la personne concernée » a le droit d’accéder à des informations relatives à son comportement et qui peuvent être préjudiciables si elles sont partagées plus largement. De même, les divulgations qui enfreindraient le secret des délibérations du gouvernement, de la défense nationale, de la politique étrangère, de la politique monétaire, des procédures judiciaires et des questions commerciales sont interdites. Les peines d’emprisonnement ne prévoient pas de sanctions pour le partage d’informations non-divulgables.

Droit des médias et liberté d’expression

Une loi sur les médias qui a été rédigée en 2016 devait être examinée au Parlement en mai 2017. Le vote fut reporté en raison de la pression des groupes de la société civile et des médias, et le sort du projet de loi est actuellement incertain. Tout en reconnaissant que la liberté de la presse constitue l’un des piliers essentiels de la démocratie, le projet de loi prévoit des peines de prison pouvant aller jusqu’à cinq ans pour la publication de contenus susceptibles d’inciter à certains crimes, à la haine raciale ou à la rébellion militaire. Cette disposition a suscité des inquiétudes parmi les médias et les groupes de la société civile, dans la mesure où elle est potentiellement « susceptible de donner lieu à de nombreuses interprétations subjectives et pourrait être exploitée par des personnes puissantes et des hommes politiques pour harceler, menacer et intimider des journalistes » (Media Foundation for West Africa).

Dans le cadre du nouveau projet de loi, et conformément à la loi de 2004 sur les médias, la diffamation est punissable d’une amende, avec notamment des amendes applicables pour diffamation du président, des forces armées, des cours et tribunaux, des membres du gouvernement ou de l’Assemblée nationale, des juges ou des témoins. La publication de fausses nouvelles et la mauvaise attribution d’informations sont donc passibles d’amendes substantielles.

Le Code pénal prévoit des peines plus sévères pour diffamation, prévoyant des peines de prison allant jusqu’à 10 ans d’emprisonnement pour diffamation pour des motifs de race, de groupe ethnique ou de religion, les peines étant doublées si l’infraction a été commise par la presse. Les accusations calomnieuses adressées à toute autorité pouvant engager des poursuites ou à l’employeur de la personne accusée peuvent être punies d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans. La publication de fausses nouvelles pouvant entraîner la désobéissance ou le discrédit des institutions nationales est punie d’une peine maximale de trois ans et d’une amende, les auteurs, les éditeurs, les vendeurs et les distributeurs étant responsables. La discordance entre le code pénal et les lois sur les médias crée une ambiguïté dans laquelle les journalistes sont potentiellement punissables de sanctions inéquitables et inégales.

Cas de lancements d’alerte

Aucun cas important de lancement d’alerte en Côte d’Ivoire n’a été détecté. Une inquiétude susceptible d’empêcher de nombreux lanceurs d’alerte est que les forces de sécurité opèrent avec une immunité quasi-totale. Cela rend improbable des poursuites à leur encontre basée sur des informations divulguées et crée une peur extrême de représailles. Par exemple, aucune poursuite n’a été engagée à la suite du massacre d’au moins 800 civils, aux mains des forces loyales au président Ouattara, commis en 2011.

Les journalistes qui rapportent des informations sensibles sont parfois arrêtés pour publication de fausses informations, insultes envers le président ou diffamation. L’affaire la plus célèbre de détention d’un journaliste a probablement eu lieu en 2015, quand l’éditeur du quotidien Aujourd’hui avait été retenu pendant une semaine après avoir publié des accusations selon lesquelles le président était complice du complot de fraude électorale de 2015. Le journal a également été suspendu pour un mois.

Droit des médias et liberté d’expression

La Côte d’Ivoire est classée comme « partiellement libre » dans le rapport sur la liberté de la presse publié par Freedom House en 2018, un statut que le pays détient depuis 2014. Le rapport note que les « tendances positives » dans l’environnement des médias se sont poursuivies en 2015, avec « peu de journalistes qui ont rapporté avoir eu des difficultés à couvrir les élections du mois d’octobre ». Toutefois, Freedom House fait état de plusieurs préoccupations persistantes, notamment des suspensions de journaux qui incitaient les lecteurs à boycotter les urnes. Le reportage détaille la détention d’un journaliste pour avoir insulté le chef de l’État en lien avec un article accusant le président d’avoir détourné de l’aide au développement. Freedom House note que cette détention était illégale et note que toutes les charges retenues contre lui ont finalement été abandonnées. Un deuxième acte d’agression à l’égard d’un journaliste a été noté : le domicile d’un journaliste a été attaqué par un large groupe de personnes alors qu’il était interrogé par les autorités au sujet d’un article décrivant une région comme « politiquement instable ».

Reporters sans frontières (RSF) classe la Côte d’Ivoire 82ème sur 180 pays en 2018, soit une amélioration de 21 places par rapport à 2014. RSF estime que « les médias ne sont pas encore indépendants des dirigeants politiques du pays » et que « le Conseil National de Communication continue à sanctionner davantage les journaux d’opposition que les journaux pro-gouvernementaux ». Cependant, il souligne l’existence d’un ensemble de média diversifié qui n’est plus officiellement soumis à un régime d’infractions criminelles, et note que « les journalistes ne sont plus soumis à de véritables abus ».

Malgré les améliorations notées par Freedom House et RSF, la mutinerie de 2017 a entraîné un déclin apparent de la liberté des médias. En février 2017, six journalistes ont été détenus dans un camp de police et interrogés pour avoir publié des informations selon lesquelles le gouvernement était parvenu à un accord pour indemniser les soldats mutins. Ils ont été libérés après 48 heures, et attribuent leur libération à la mobilisation de masse des journalistes ivoiriens. Les journalistes sont accusés de « diffusion de fausses informations pour inciter les soldats à se révolter » et attendent actuellement leur procès. Deux autres journalistes ont été interpellés en juillet 2017 à la suite de révélations selon lesquelles les comptes bancaires du président de l’Assemblée nationale auraient été gelés.

Centres de connaissances, de soutien et d’action

Social Justice Cote d’Ivoire

Une ONG sous la tutelle de Transparency International qui œuvre pour lutter contre la corruption et plaider en faveur de la transparence et de la bonne gouvernance, notamment en ce qui concerne les ressources naturelles et la justice sociale.

  • Personne de contact et titre (si connu): Non disponible
  • Adresse: Côte d’Ivoire, Abidjan, Yopougon, Ananeraie Oasis, Ilot 01, lot 3109.
  • Tel: (+225) 23.52.72.13 – 05.76.20.95
  • Fax: Not available
  • Site web: http://www.socialjustice-ci.net/
  • E-mail: via le formulaire Web http://www.socialjustice-ci.net/

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